La justice britannique ne laissera pas la junior nigériane Aiteo échapper à un arbitrage face à ces créanciers, qui lui ont prêté 2 milliards de dollars pour financier en 2014 l’acquisition des 40 % de Shell dans le politique bloc pétrolier OML 29 (les 60 % restants étant détenus par la société d’Etat NNPC).
Fondée et dirigée par le magnat nigérian du trading pétrolier Benedict Peters (AI du 17/03/20), Aiteo avait acquis pour 2,5 milliards de dollars cet actif dans l’Etat pétrolier de Bayelsa. Ce deal avait constitué à l’époque la plus grosse acquisition jamais réalisée par une firme pétrolière nigériane. Ses neuf créanciers parmi lesquels figure notamment Afica Finance Corp (AFC), Ecobank, Sterling Bank, Union Bank of Nigeria, ou encore Zenith Bank tentent depuis lors d’obtenir le remboursement du prêt consenti pour cet achat. Trois procédures distinctes sont en cours devant la haute cour nigériane, la haute cour britannique et le siège londonien de la Chambre de commerce internationale (CCI). Aiteo a récemment tenté de faire valoir devant la haute cour britannique que les banques prêteuses avaient renoncé à leur droit à l’arbitrage une clause pourtant prévue dans le contrat entre Aiteo et ses prêteurs en cas de différend au motif qu’elles avaient fait appel de la décision rendue par une cour nigériane, plutôt que de demander la suspension de la procédure.
Une décision qui caractérise, selon Aiteo, la volonté des créanciers de régler le différend devant les tribunaux et non en arbitrage. Le 1er avril, le juge britannique Nigel Teare a rejeté cette affirmation, affirment que cet appel ne constituait en aucun cas une renonciation à l’arbitrage.
Les Négociations S’enlisent
Les créanciers d’Aiteo ont saisi la CCI en décembre 2020, après avoir tenté pendant plusieurs mois de négocier une sortie de crise avec le patron d’Aiteo. Les banques comptaient beaucoup sur ces discussions, étant donné les sommes en jeu et la quasi-impossibilité de reprendre le bloc. En mars 2019, leurs représentants s’étaient même rendus à Accra – Benedict Peters est exilé au Ghana depuis l’arrivée au pouvoir de Mahammadu Buhari au Nigeria pour discuter avec lui d’un rééchelonnement de la dette (AI du 12/03/19). Quelques plus tard, en octobre, le ton s’est durci et les établissements bancaires ont demandé à Aiteo de régler ses comptes dans les septe jour.
Aiteo a ensuite engagé des poursuites contre ses créanciers au Nigeria, estimant qu’elle n’était pas responsable de la dette puisque les prêteurs avaient rejeté sa demande de restructuration. La justice nigériane a donné raison à la junior en 2020, interdisant dans le même temps à ses créanciers d’engager des procédures dans d’autres pays. Les banques ont fait appel de cette ordonnance, mais leur appel n’a toujours pas été entendu. Il a d’abord été ajourné deux fois puis gelé par la pandémie de Covid-19. Les négociations amiables n’ayant rien donné non plus, l’AFC et les banques nigérianes se sont tournées vers la CCI fin 2020, sur les conseils des cabinets d’avocats Freshfiels Bruckhaus Deringer et Aluko & Oyebode. De son côté, Aiteo est représenté par la firme londonienne Stewarts Law.